Bruxelles, le 10 février 2009
Monsieur Nicolas SARKOZY
Président de la République française
Palais de l'Elysée
55, rue du Faubourg Saint Honoré
F-75008 PARIS
Monsieur le Président de la République,
En écrivant ces lignes, je suis consciente de rompre certains usages. Mais s'il n'est synonyme de sagesse, l'âge qui est le mien confère peut-être une plus grande liberté d'expression.
Je fais partie de ces nombreux Luxembourgeois à qui rien de ce qui est français n'est étranger. Tout au long de mon parcours et de ma carrière politique, je n'ai cessé de marquer mon attachement à la France, au siège européen de Strasbourg en premier lieu, que je continuerai à défendre, quand bien même les autorités françaises se seront résignées à baisser la garde.
Je viens de découvrir avec beaucoup de déception que ceux de mes collègues français du groupe PPE-DE qui ont le plus fait honneur à leur mandat de député risquent de ne plus revenir siéger sur les bancs du Parlement européen. J'en éprouve un vif regret doublé d'un sentiment d'injustice.
Margie Sudre, je veux en témoigner, a présidé aux destinées de la délégation française avec un sens aigu de la diplomatie. Son tact et son élégance sont un modèle pour nous tous, au sein du groupe et au-delà. S'il faut se réjouir que la France soit à nouveau au cœur du jeu européen, c'est notamment à l'inventivité d'Alain Lamassoure que l'on le doit. Mon collègue Alain qui allie compétence et humour est un homme-clé du Parlement: je ne puis comprendre que l'on accepte l'éventualité de s'en priver. S'il m'est arrivé de râler contre Jacques Toubon lorsqu'il a réussi à vider la directive "services" de sa substance, j'admire son application, son énergie et sa fidélité peu communes. Enfin, je suis ravie de pouvoir compter au sein de la commission économique et monétaire sur un collègue aussi présent et compétent que Jean-Paul Gauzès. Son travail a reçu un bel hommage par ses pairs: il vient d'être élu à l'unanimité « coordinateur » du groupe PPE, une fonction essentielle.
A mon sens, le souci de renouvellement - qui est bien légitime, bien que je n'en sois pas moi-même le meilleur exemple - ne devrait conduire à se séparer de ceux qui ont fait leurs preuves de manière incontestable. Pour fréquenter les travées du Parlement européen depuis des décennies, je sais d'expérience qu'une seule chose compte: c'est la qualité du travail du député et son implication qui déterminent son influence. Tout le reste n'est que littérature.
J'ai encore appris à me méfier des « grands noms de la politique » parachutés ou exilés, faute de mieux. Dans la vie parlementaire au jour le jour, les essais de ce type ont rarement été concluants. Et je ne prendrai pas le risque de parier sur un brutal renversement des choses au cours des prochains mois.
Lorsque vous vous êtes déplacé à Strasbourg à trois reprises pour rendre compte des travaux du Conseil européen, les députés européens ont certes été sensibles à la pertinence de vos arguments et à l'art de les présenter. Mais je pense qu'ils ont surtout été épatés par votre implication et votre capacité à répondre, seul, aux remarques et commentaires de tous bancs. C'est en agissant de la sorte que vous avez convaincu votre auditoire.
Avec l'entrée en vigueur du traité de Lisbonne et l'extension de la «codécision», chaque État-membre aura le plus grand intérêt à déléguer des députés expérimentés et travailleurs. Si les campagnes électorales qui vont s'ouvrir dans nos États devaient servir à quelque chose, je formule le souhait le plus cher qu'elles fassent apparaître cette vérité au grand jour.
Il est probable que mon sentiment personnel ne pèse que peu de poids face à d'autres considérations. J'éprouverai cependant la satisfaction de vous en avoir fait part, parce que le jeu en vaut la chandelle et que l'on se doit de dire ce à quoi l'on croit profondément.
Je vous prie d'agréer, Monsieur le Président de la République, l'expression de ma plus haute considération,
Astrid LULLING
Députée au Parlement européen
Dienstag, 10. Februar 2009
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