Intervention d'Astrid Lulling au Parlement Européen
"En votant ce texte en l’état, sans vraiment savoir où nous allons, nous faisons un peu, comme si rien ne s’était passé.... Voilà pourquoi, je m’abstiendrai, même si j’ai signé les amendements de compromis négociés avec le Conseil."
En tant que rapporteur fictif pour le groupe PPE-ED, Astrid Lulling est intervenue lors du débat sur la refonte de la directive en matière d'opcvm (fonds d'investissement).Cette refonte comporte un certain d'innovations qui auront un impact important sur l'industrie luxembourgeoise des fonds d'investissement. Astrid Lulling a défendu une position minoritaire, parce que le nouveau texte comporte trop d'incertitudes à ses yeux. Elle s'en est expliquée lors de son intervention:
"Monsieur le Président,
Plus que jamais, la proposition de directive que le Parlement européen s’apprête à voter en matière d’opcvm suscite en moi un sentiment très mitigé.
Il est vrai que le rapporteur M. Klinz a effectué depuis des mois, voire des années un travail de longue haleine et qu’il a négocié avec talent, notamment lors du trilogue.
Il est vrai aussi que la directive connaît un certain nombre d’avancées significatives, allant dans le sens d’un meilleur fonctionnement du marché intérieur de la gestion collective d’actifs financiers et saluées comme telles par l’industrie européenne des fonds d’investissements.
Il reste que les débats et les discussions au Conseil et au Parlement n’ont jamais été tout à fait libres, puisque le résultat était connu d’avance : pour certains acteurs, il fallait coûte que coûte introduire le passeport européen pour les sociétés de gestion.
Sur le principe, il n’y a rien à y redire. Le passeport se défend tout à fait. Encore faut-il s’assurer que l'introduction du passeport pour les sociétés de gestion s'accompagne des garanties nécessaires, notamment en matière de supervision des fonds, puisqu’il aboutit à une dissociation des fonctions au-delà des frontières.
Or je constate avec regret que le système mis en place est non seulement complexe, mais qu’il est sujet à des interprétations divergentes. Il risque bien vite de se heurter à des difficultés pratiques qui nuiront à l'industrie européenne des fonds, notamment à l'exportation vis-à-vis des pays tiers.
J’ai bien pris acte que ma position est minoritaire au sein de mon groupe, comme au sein de cette assemblée. Pour autant, je ne me sens pas mal à l’aise.
En temps normal, j’aurais été tentée de dire que seule la pratique permettra de tirer des conclusions définitives en la matière et donc de déterminer qui a raison entre ceux qui font confiance aux facultés d’adaptation des acteurs du marché et ceux qui s’en tiennent à une démarche plus prudente.
Il n’est pas exclu que le succès soit au bout, mais d’un autre côté rien ne le garantit non plus.
Or l’actualité très récente, notamment le scandale Madoff et ses implications sur l’industrie de la gestion collective d’actifs financiers, n’est pas faite pour nous rassurer. Au scepticisme succède mon inquiétude, notre inquiétude.
L’industrie des fonds d’investissements ne sera pas épargnée par la crise financière, nous le constatons à présent. Il se peut que des remises en cause fondamentales soient nécessaires.
Que dans ce contexte de crise profonde, nous opérions des choix qui diluent les responsabilités des acteurs ou alors qui présupposent une coopération parfaite entre autorités de contrôle peut vraiment passer pour une incongruité.
Je vous le dis comme je le pense, cette directive en matière d’opcvm est aussi celle d’une période révolue, d’avant la crise. Elle est marquée par une certaine insouciance.
En effet le système financier va traverser une crise de confiance durable et fondamentale. De pans entiers de son architecture doivent être repensés.
Ne l’oublions pas : la fonction première des opcvm est la protection de l’investisseur, par la diversification des risques et l’établissement de règles strictes.
En votant ce texte en l’état, sans vraiment savoir où nous allons, nous faisons un peu, comme si rien ne s’était passé. Cet autisme n’annonce rien de bon. Voilà pourquoi, je m’abstiendrai, même si j’ai signé les amendements de compromis négociés avec le Conseil.
Vu les circonstances, les améliorations apportées me paraissent en effet de peu de poids face aux questions de principe que je viens d’expliquer."
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