es élections sans importance?
Concurrencées par les élections législatives, les élections européennes sont traditionnellement reléguées au second plan dans notre pays. L’année 2009 ne semble pas faire exception à la règle pour l’instant, d’autant que les effets de la crise économique et financière sont un sujet de préoccupation plus immédiat pour nos concitoyens.
Dans le contexte présent, l’enjeu européen apparaît encore plus lointain ou abstrait que d’habitude. Les sondages alarmistes prévoient d’ailleurs une participation catastrophique des citoyens de l’ensemble de l’Union européenne à l’élection de leurs représentants à Strasbourg. C’est un signe très inquiétant! Au Luxembourg, où le vote est obligatoire, la problématique de la participation civique se présente en des termes différents.
Mais je ne crois pas prématuré de conclure que l’accord trouvé entre les principales forces politiques du pays, à l’exception de l’adr, c’est-à-dire l’impossibilité d’une double candidature, n’est pas à la mesure de l’enjeu. C’est en fait une demi-mesure qui ne règle pas grand chose. Certes les candidats élus se sont engagés à siéger au Parlement européen. De ce point de vue, l’on peut y voir un progrès par rapport au passé. La seule solution cohérente qui vaille consisterait, nous le savons, à séparer dans le temps les deux élections. J’avais osé clamer haut et fort cette opinion tenant de l’évidence, notamment à l’automne dernier. Quelle ne fut pas ma surprise de me voir attaquée rudement, sous prétexte que ma proposition conduisait à préconiser une crise gouvernementale!
La concomitance des deux scrutins étant cependant maintenue jusqu’à nouvel ordre, il convient de s’accommoder d’une situation paradoxale. A l’enthousiasme mesuré mais réel qui a présidé à la première élection au suffrage universel du Parlement européen en 1979 s’est substitué un sentiment plus mitigé, teinté d’indifférence ou d’ignorance. La participation électorale dans les différents pays de l’Union européenne dessine une courbe similaire dans un sens négatif.
En même temps, au gré des traités successifs, le Parlement européen a acquis une place très enviable au sein de l’édifice institutionnel communautaire. Ses pouvoirs n’ont cessé de croître, à travers notamment la procédure de la « codécision », qui fait de lui un co-législateur au même titre que le conseil des ministres. Doté par ailleurs du pouvoir budgétaire, exerçant un contrôle démocratique sur la Commission, le Parlement européen verra encore ses compétences accrues, au jour où entrera en vigueur le traité de Lisbonne. La « codécision » deviendra la règle et les domaines où les parlementaires se borneront à formuler un avis deviendront l’exception.
Il est de nombreuses raisons pour élire le 7 juin ses députés européens. Non seulement parce que les représentants directs des peuples exercent un pouvoir croissant en Europe, mais aussi parce que leurs décisions ont un impact essentiel sur la vie quotidienne de nos concitoyens, tant professionnelle que privée.
Tarifs téléphoniques, sécurité alimentaire ou voyages : les eurodéputés peuvent se considérer à bon titre comme les premiers défenseurs des consommateurs en Europe. Autre exemple, le combat pour l’égalité entre femmes et hommes doit beaucoup aux députés européens. Ceux-ci peuvent encore se prévaloir d’avoir trouvé un meilleur équilibre, lorsqu’ils ont réécrit la directive services ou le règlement « Reach » sur l’utilisation des substances chimiques en Europe.
Sur basant sur le constat que la majorité de la législation nationale provient de nos jours de la législation communautaire, un esprit provocateur pourrait même avancer que l’élection au Parlement européen n’est pas loin de dépasser l’enjeu du scrutin national. Ce serait aller un peu vite en besogne, puisque les législatives ont une incidence directe sur la composition du gouvernement et l’orientation politique fondamentale qui est donnée au pays sur les cinq prochaines années. Mais sur le travail législatif proprement dit, je ne suis pas loin de penser que l’importance du Parlement européen prédomine.
Au-delà du choix civique, les élections européennes sont aussi l’occasion d’un choix partisan et d’un choix “patriotique”. Dans une large mesure, les forces politiques luxembourgeoises ont une sensibilité commune face aux grands enjeux communautaires. Il serait ridicule de le nier. Mais la désignation d’élus dont les décisions sont déterminées sur des bases idéologiques conduit bien à des différences. Les élus luxembourgeois auront beau se connaître, se concerter voire s’apprécier, leur adhésion aux grands groupes politiques du Parlement européen les conduira à agir individuellement et séparément.
Reste enfin, un aspect essentiel à mes yeux, le choix “patriotique”, terme peut-être mal assuré. Les élections du 7 juin sont aussi un événement décisif pour l’influence du Luxembourg au niveau communautaire.
Je ne cesse de le répéter à mes visiteurs, le mandat de député européen est des plus exigeants et en même temps des plus passionnants. Il n’y pas de critère de nationalité qui tienne. En effet l'influence d'un député dépend uniquement de son implication et de son travail. Les députés luxembourgeois ont bien un rôle déterminant à jouer: leur petit nombre n'est pas synomyme d'impuissance, bien au contraire, pourvu qu'ils s'en donnent vraiment la peine.
Si j’avais un voeu à émettre, au-delà des clivages politiques et des intérêts personnels de chacun, ce serait que les électeurs envoient à Strasbourg six députés, pleinement conscients de leur charge et désireux de s’investir sans retenue. A n’en pas douter, leur investissement serait un bienfait pour l’Europe, leur pays et aussi pour eux-mêmes.
Astrid Lulling
Dienstag, 2. Juni 2009
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